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Moyens
technologiques de manipulation des masses
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Expériences
subliminales
L’imagerie
fonctionnelle du cerveau constitue un axe privilégié de recherche.
Des travaux très originaux concernant la mise en évidence grâce à l’IRMf
des régions cérébrales sollicitées au cours de tâches cognitives
inconscientes
(perception d’images subliminales, Nature,1998 ; Nature
Neuroscience, 2001), ou conscientes (calcul, Science, 1999), ont été
récemment publiés. Ces travaux, basés sur l’acquisition
d’informations par des méthodologies d’imagerie complémentaires
(imagerie multimodale) contribuent à la cartographie des fonctions
cérébrales.
Les recherches menées au
SHFJ visent à
l’identification des réseaux neuronaux impliqués dans ces fonctions
cognitives supérieures (langage, calcul, conscience), y compris dans
leurs aspects spatio-temporels
Les effets
inconscient de la météo
C’est une recherche concernant les effets de la météorologie sur le
jugement de satisfaction réalisée par Schwarz et Clore (1983). Dans
une première phase de la recherche, ils avaient contacté par
téléphone des sujets soit un jour ensoleillé, soit un jour de pluie
pour les interroger sur leurs satisfactions dans la vie sociale,
soi-disant dans le cadre d’un sondage. Les questions posées
concernaient la vie familiale et la vie professionnelle. Les sujets
avaient la possibilité de graduer leur jugement de « très
satisfaisant » à « pas du tout satisfaisant ». Les conditions
d’interrogation des deux groupes étaient identiques, le seul facteur
qui variait était la météo. Les résultas ont montrés que les sujets
interrogés un jour de pluie se sont déclarés en moyenne plus
satisfaits de leurs vies ceux interrogés un jour ensoleillé. Les
auteurs ont donc conclu que les sujets, sans en avoir conscience,
ont été influencés par la météo. Pour être sûr que cet effet est
bien dû au temps et qu’il ne s’agit pas d’un résultat faussé, les
deux chercheurs ont avancé l’hypothèse qu’ils pouvaient éliminer «
cet effet météo » sur le jugement en évoquant avec les sujets le
temps qu’il faisait avant de les interroger. Ce fut l’objet d’une
seconde interrogation lors de la seconde phase de la recherche. Les
soi-disant enquêteurs ont d’abord évoqué le temps qu’il faisait dans
les villes des sondés (prétextant téléphoner de loin) avant
d’aborder avec eux leur satisfaction sur leurs vie professionnelle.
Les résultats montrent qu’il n’y a plus d’effet de la météo sur le
jugement.
Cette expérience met en évidence les effets des informations (ici la
météo) traitées en dehors de la conscience sur le jugement, ces
effets qui ne sont absolument pas accessibles à la conscience.
Le jugement de préférence
Zajonc (1980) considère que nous avons d’abord des préférences que
nous justifions ensuite, que nous rendons rationnelles car
l’entourage ne cesse de nous questionner sur nos choix, nos
décisions, nos préférences, etc. Les critères ou les raisons de nos
choix ne nous sont pas consciemment accessibles, aussi nous en
inventons à nos propre yeux et aux yeux d’autrui. Zajonc et ses
collaborateurs ont montré qu’une présentation subliminale de
stimulus produit chez les sujets un jugement de préférence élevé
qu’envers des stimuli non présentés. L’expérience réalisée par les
auteurs a consisté à présenter aux sujets des figures géométriques
de manière subliminale pendant une durée de 5ms à l’aide d’un
tachistoscope. Lors d’une seconde phase de l’expérience, on
présentait à ces mêmes sujets des paires de stimuli constituées
d’une figure déjà présentée de manière subliminale et d’une figure
nouvelle. Le stimulus déjà présenté était placé tantôt à droite,
tantôt à gauche pour éviter les effets d’ordre. Les sujets devaient
dire d’abord s’ils reconnaissaient l’un des stimuli et ensuite, de
dire lequel des deux ils préféraient. Les sujets d’un second groupe,
pour contrôler les effets d’ordre de présentation, devaient d’abord
dire lequel des deux stimuli ils préféraient, et ensuite dire lequel
ils reconnaissaient avoir vu lors de la première phase. Les
résultats montrent que les sujets des deux conditions expérimentales
ne reconnaissent pas les stimuli, en revanche, dans 60% des cas les
stimuli présentés de manière subliminale.
Zajonc a donc
montré que même en l’absence de toute reconnaissance , les sujets
ont une préférence pour les stimuli qu’ils ont rencontrés auparavant
même si ces derniers ont été présenté de manière subliminale.
Le jugement d’autrui
Juger que nous ressentons une sympathie ou une attirance envers une
personne serait soumis à de multiples facteurs internes et externes
non accessibles à la conscience. Au niveau visuel des chercheurs ont
montré que nous réagissons positivement aux individus qui ont la
pupille dilatée et négativement lorsqu’ ils ont la pupille rétrécie.
Niedenthal et Cantor (1986) ont montré que ces informations,
traitées en dehors de la conscience, affectent le jugement envers
une personne que nous avons en face de nous. Ils ont réalisé une
recherche expérimentale pour mettre en évidence un tel effet. Quatre
photos de jeunes femmes ayant la pupille dilatée et quatre autres
photos des mêmes individus mais avec cette fois la pupille rétrécie
ont été réalisées. L’ensemble de ces photographies étaient présenté
à des sujets qui devaient les juger sur un ensemble de traits de
personnalité. Les résultats sont éloquents : les photos des
individus à pupille dilatée ont reçu davantage de descriptions
positives et ceux à pupille rétrécie ont reçues des jugements
négatifs. Les entretiens post-expérimentaux montrent que les sujets
étaient totalement non conscient de la dilatation de la pupille.
Il s’agit ici d’une information non consciente et traitée de manière
subliminale qui a eu un effet très net sur le jugement d’un
individu.
Les effets des messages publicitaires
Channouf et Rouibah (1995) ont formulé l’hypothèse que des messages
publicitaires présentés immédiatement après l’exposition subliminale
de visage de personnes célèbres seraient jugés plus crédibles ou
plus vrais que les messages précédés par des personnes inconnues. En
revanche, si les visages sont présentés pendant une durée
suffisamment longue pour permettre leur reconnaissance par les
sujets, on ne devrait pas trouver de différence en fonction de la de
la célébrité de ces visages. Pour effectuer cette hypothèse, les
auteurs ont utilisé des temps de présentation des visage de 50 ms
pour une présentation subliminale et de 400 ms pour une présentation
consciente. Une série de 16 visages célèbres constituées de visages
de politiciens, de chanteurs, d’acteurs, de présentateurs
d’émissions télévisées et de sportifs a été établie. Ces visages ont
été choisis de manière à ce qu’il y ait autant de femmes que
d’hommes. 16 autres visages de personnes inconnues ont été choisis
pour constituer une seconde série. Le choix de ces 16 visages s’est
fait de manière à ce qu’à chacun des visages célèbres corresponde un
visage inconnu identique quant aux variables sexe et âge. Ainsi,
deux séries de 32 visages ont été construites pour former un
ensemble de 32 visages. 32 messages, jugés au préalable ni vrai ni
faux, ont été retenus. Ces 32 messages ont été associés
aléatoirement pour une moitié de sujets aux 16 visages célèbres et
l’autre moitié aux 16 visages inconnu. Chaque sujet était installé
face à un ordinateur dans une salle bien éclairée. Un point de
fixation central apparaissait alors pendant 200 ms afin que chaque
sujet puisse fixer son regard au centre de l’écran. Après un
intervalle de 700 ms un visage apparaissait au centre de l’écran
durant 50 ms (condition subliminale) ou durant 400 ms (condition
consciente). Après un autre intervalle de 50 ms, un message était
présenté. Il s’agissait pour les sujets de lire le message à l’écran
et de dire par une réponse binaire, la plus rapide possible, si le
message leur paraissait vrai ou faux. La réponse du clavier
entraînait la disparition d’un message publicitaire et entraînait la
présentation d’un visage puis d’un autre visage et ainsi de suite.
La variable utilisée dans cette expérience est le nombre de messages
jugés vrais pour chaque pour chaque type de visage. Les deux auteurs
ont observé un effet significatif du type de visage.
Il y a un effet
significatif du type de visage présenté (célèbre ou inconnu) dans le
cas du subliminal pour le jugement sur le message publicitaire.
Ainsi les sujets estiment plus vrai un message lorsqu’ il est
précédé d’un visage célèbre que lorsqu’ il est précédé d’un visage
inconnu.
Étude menée par le CNRS
L' étude a été menée de la manière suivante : plusieurs informations
ont été présentées sur des écrans d'ordinateurs à différents sujets,
dans l'ordre suivant :
- une série de lettres aléatoire (par exemple QDJGLS)
- un premier nombre (par exemple SEPT)
- une autre série de lettres aléatoire (par exemple HJKQKF)
- et enfin un second nombre (par exemple NEUF).
Le premier nombre est présenté très brièvement, pendant 43 millièmes
de seconde, en sorte qu'il est littéralement invisible ; même des
personnes informées de sa présence ne parviennent pas à le repérer
ou à le lire. En revanche, le second nombre est présenté
suffisamment longtemps pour que le sujet puisse en prendre
connaissance.
La perception, même inconsciente, du premier chiffre influence le
comportement du sujet.
En effet, lorsque le chercheur demande au sujet si le second nombre,
(ici neuf), clairement visible, est plus grand ou plus petit que
cinq, sa réponse est plus rapide lorsque l'on a présenté entre les
deux un nombre subliminal intermédiaire (ici sept). Comme le sujet a
tenu compte du chiffre sept, bien qu'il n'ait pas été informé de sa
présence, ceci implique que le nombre caché a été reconnu par le
sujet, et qu'il en a inconsciemment évalué la grandeur numérique.
Pendant que les sujets donnaient leur réponse à la question posée en
pressant un bouton, les chercheurs enregistraient l'activité
électrique de leur cerveau (c'est un électroencéphalogramme : EEG),
ou utilisaient la récente méthode d'imagerie fonctionnelle par
résonance magnétique nucléaire (IRMF). Cette méthode est sensible
aux variations de débit sanguin cérébral dues à une action mentale
unique, et est complémentaire de l'EEG : elle localise très
précisément le traitement inconscient à des régions bien précises du
cerveau, tandis que l'EEG en précise le déroulement temporel. Les
résultats obtenus ont démontré que l'influence du nombre caché se
fait sentir sur l'ensemble du traitement de l'information dans le
cerveau, et qu'elle ne se restreint pas aux zones impliquées dans
des processus sensoriels. Au contraire, même le cortex moteur,
responsable de la commande des mouvements, bien distincte des
commandes intellectuelles, se trouve activé dans cette tâche très
simple.
Les zones du
cerveau impliquées dans le traitement de l'information inconsciente
s'avèrent ainsi être tout à fait comparables à celles impliquées
lors du traitement de l'information consciente.
Ceci n'exclut pas que, dans des tâches plus complexes, le traitement
conscient soit associé à des régions cérébrales spécifiques.
Ces nouveaux résultats confirment que notre cerveau fonctionne très
largement sur un mode inconscient.
L'identification visuelle, l'accès au sens des mots, et même la
programmation motrice peuvent se dérouler très efficacement sans que
nous en prenions conscience.
L'intérêt principal de cette étude est de contribuer à une meilleure
compréhension des bases cérébrales de la conscience, l'une des
questions les plus débattues de cette "décennie du cerveau".
Représentation de l'activité
électrique du cerveau, lors d'une réponse motrice
consciente (image du haut), et d'une préparation motrice
inconsciente (image du bas). Les circuits moteurs activées lors
d'une action réelle et lors d'un processus inconscient sont
identiques. Notez la différence du temps de réaction visible sur les
deux écrans d' ordinateur. On remarque que lorsqu'un nombre
subliminal a été introduit, le temps de réaction est plus court. |